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samedi 24 novembre 2012

Valls est-il maître au ministère de l'Intérieur ?

Manuel Valls est manipulé par ses propres services…

Entretien réalisé par Robert Ménard et Emmanuelle Duverger.

Alain Orsoni,  activiste corse,
président AC Ajaccio
Alain Orsoni est aujourd’hui au cœur de la polémique. Plusieurs de ses " amis " — ou présentés comme tels dans les media — ont été assassinés. Figure du nationalisme corse — il fut le fondateur du MPA (Mouvement pour l’autodétermination) —, actuel président de l’ACA (un des clubs de football d’Ajaccio), il a accordé un long entretien à Boulevard Voltaire. Voici le premier volet…
BV. Vous dites que vous êtes serein, mais en même temps, que vous avez peur…
AO. Avec les journalistes, il faut bien peser ses mots car ils ont tendance à tout interpréter comme ça les arrange.
J’ai très exactement déclaré que j’étais terrorisé par la campagne de presse qui s’est développée à la suite de la mort de Jacques Nacer 1. On a le sentiment que les médias ont trouvé la solution (la police en étant, elle, incapable) : en Corse, on tue les amis d’Orsoni.
Je me pose une question étrange : comment se fait-il, alors que je pars tous les matins à 9h de chez moi et que je rentre tous les soirs entre 18 et 20h en fonction de ma charge de travail, que des gens se donnent autant de mal pour liquider des personnes que je connais, afin de m’atteindre si je comprends bien, alors qu’il serait si simple de me tuer directement… Donc, pour revenir à votre question, je suis terrorisé par le fait qu’on me fasse systématiquement endosser la responsabilité de ces histoires et qu’on me colle, d’une certaine manière, une cible dans le dos…
A force de tout ramener à moi, un de ces quatre matins, je vais effectivement finir par m’en prendre une…
Vous n’avez donc pas peur et vous n’allez pas quitter la France, comme on peut le lire dans la presse.
Je vous ai expliqué le contexte dans lequel j’avais peur. A force d’en faire des tonnes sur Orsoni, on me met en danger. En Corse, la rumeur tue, malheureusement.
Avec mon passé politique mouvementé, on peut décider de faire resurgir une vieille histoire et hop ! On n’aura ensuite qu’à la relier aux événements de ces derniers mois… La rumeur est relayée par les médias, sans qu’ils ne se posent aucune question. On affirme des choses de façon péremptoire, on se copie les uns les autres…
Mais lorsque quatre de vos amis sont assassinés, on peut y voir un lien…
C’est faux ! Le mot ami a un sens précis. Parmi ces quatre personnes, Antoine Nivaggioni 2 était un intime. Pour Noël Andréani 3, la police connaît très bien les probables raisons de son assassinat, qui n’ont rien à voir avec moi…
Quant à Antoine Sollacaro 4 et Jacques Nacer, on dit n’importe quoi. Le premier était mon avocat, et un ami, c’est vrai. Sans être un intime.
Jacques Nacer, lui, était un supporter de l’ACA, seul club professionnel de France géré par une association qui n’a pas le droit de faire des bénéfices et réinvestit tous les profits qu’elle fait immédiatement. Le seul dirigeant salarié de cette association, c’est moi, à hauteur de 4 000 € par mois. Point barre.
Mais quand Manuel Valls laisse entendre que le sport pourrait servir au blanchiment d’argent, c’est évidemment vous qu’il vise ?
C’est énorme ! Car, évidemment, quand il parle du sport, il parle de l’ACA. Comment Manuel Valls, ministre, peut-il dire une énormité pareille ? Je crois sincèrement qu’il est manipulé par certains éléments de ses propres services. La DNCG (Direction générale de contrôle de gestion des clubs) est d’une rigueur incroyable ! Tout est contrôlé au centime près. Nous passons tous les ans devant elle, au contraire de certains grands clubs, et notre audition dure au maximum un quart d’heure. Pourquoi ? Parce que nos comptes sont limpides.
Blanchir de l’argent signifie injecter de l’argent sale pour le récupérer blanchi.
L’ACA a un budget de 20 millions d’euros, répartis de la façon suivante :
- 12,5 millions d’euros pour les droits de transmission télévisée. C’est la part fixe que touchent tous les clubs ;
- 2,3 millions d’euros au titre des droits télévisés répartis en fonction du classement du club ;
- 1 million au titre de la vente des panneaux de publicité, ce qui est une somme ridicule pour un club de foot. La plupart des clubs vendent aussi l’emplacement de leurs maillots. Nous l’avons offert aux Restos du cœur ;
On arrive à 16,8 millions. Ajoutez les subventions accordées à tout club de foot dans toutes les villes et toutes les régions de France (et on est les derniers), qui correspondent, pour Ajaccio, à 800 000 euros. Le reste est constitué des recettes de la boutique, des recettes des visiteurs du club et de celles des abonnés.
On n’achète jamais de joueurs parce qu’on n’en a pas les moyens. Quand on achète un joueur, c’est qu’il est libre et on n’a qu’à se mettre d’accord avec lui sur le montant de son salaire. Dans ces conditions, comment voulez-vous que l’on blanchisse de l’argent ? Comment peut-on dire une bêtise pareille ? C’est hallucinant.
Comment l’expliquez-vous ?
En ce qui concerne Manuel Valls, il doit être extrêmement mal informé, pour ne pas dire manipulé. Ou alors on nage en plein délire… J’invite le ministre à envoyer ses services passer au crible la comptabilité de notre club.
Dans quel but les médias colporteraient-ils de fausses rumeurs ?
La presse dit beaucoup de bêtises. Beaucoup plus que vous ne le soupçonnez… Vous désirez que je vous explique pourquoi ils mentent et pourquoi ils sont incompétents ? Pourquoi ils se copient les uns les autres ? Mais je ne peux pas vous donner d’explication. C’est tellement ahurissant que je n’arrive pas à comprendre. Je suis atterré.
Pourquoi tout le monde vous accuse-t-il de dérives mafieuses ?
J’aimerais bien le savoir. Je lis la presse comme vous et je vois des informations étonnantes comme : « Orsoni est un homme d’affaires. » Depuis quand ? Je ne possède aucune affaire, ni en Corse ni sur le continent. Je n’ai aucun restaurant. Je ne suis ni dans le BTP ni dans l’immobilier. Je ne vends pas de terrains non plus. Je suis uniquement gérant de mon club de foot et ça me rapporte 4 000 € par mois, je vous l’ai dit. C’est tout. Je ne pleure pas d’ailleurs. Beaucoup de gens aimeraient gagner cette somme. Je ne suis pas malheureux mais je suis loin d’être quelqu’un de riche…
Vous travaillez toujours pour la PEFACO, une société de machines à sous à Barcelone ?
Bien sûr que non ! Je n’en ai plus le droit depuis que j’ai été impliqué dans cette affaire 5 en 2009. Comment voulez-vous que je fasse des affaires à l’étranger alors que je suis assigné à résider en France ?
Donc, la presse raconte encore une fois n’importe quoi ?
Vous faites allusion aux articles qui prétendent que je travaille pour PEFACO ? C’est moi qui devrais vous interroger, vous journalistes : comment pouvez-vous vous permettre, sans avoir fait l’ombre d’une vérification, d’affirmer des saloperies pareilles ? Je mets au défi quiconque de sortir quoi que ce soit sur ma prétendue fortune. Je n’en ai pas… Je gagne correctement ma vie mais ceux qui veulent insinuer que je brasse des millions d’euros sont dans le fantasme. C’est inimaginable.
C’est à cause de votre parcours. Vous avez quitté la France pour aller travailler en Amérique latine pendant 12 ans, dans l’industrie du jeu…
Vous venez de parler de l’industrie du jeu : c’est ainsi que le jeu est considéré dans quasiment le monde entier. Sauf en France. Quant à la Française des jeux, sorte de mafia organisée, elle escroque l’ensemble des parieurs français de manière éhontée. Mais tout le monde s’en fout ! Personne n’en parle. Mais c’est un vrai scandale !
Alors, l’industrie du jeu, comme vous dites, qui existe depuis la nuit des temps et qui fonctionne dans quasiment tous les pays du monde, m’a demandé de travailler pour elle en tant que consultant. J’ai démarché pour elle en Amérique Latine, j’ai été payé pour cela et je n’en ai pas honte. Je regrette de ne pas gagner plus d’argent, ça me plairait. Mais on raconte vraiment n’importe quoi. Encore une fois, je ne travaille plus pour PEFACO depuis 2009.
Alain Orsoni, le 24 novembre 2012
  1. Jacques Nacer, Président de la chambre de commerce et d’industrie de la Corse du Sud et secrétaire général de l’ACA, a été abattu par un tireur le 14 novembre 2012. 
  2. Antoine Nivaggioni, ancien militant nationaliste du MPA, a été abattu le 18 octobre 2010. 
  3. Noël Andréani, Ancien militant nationaliste du MPA, a été tué par balles le 27 juin 2009. 
  4. Antoine Sollacaro, avocat et ancien bâtonnier d’Ajaccio, a été abattu sur l’aire d’une station-service de la route des Sanguinaires, au volant de sa voiture, le 16 octobre 2012. 
  5. En juin 2009, Alain Orsoni a été interpellé avec plusieurs personnes dans le cadre de l’enquête sur la vague d’assassinats en Corse dans le milieu du grand banditisme. En l’absence de preuves à son encontre, il sera relâché après une grève de la faim de trente-six jours. 

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