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mercredi 23 mars 2011

Wikileaks, de l'eau de rose, comparé au Canard enchaîné

Pan sur le bec du "Canard enchaîné"
Le quotidien suisse Le Temps jette un pavé dans la mare du journal satirique

Mais ce pavé éclabousse l'ensemble de la presse française, car les Helvètes épinglent l'hebdomadaire en déclarant le Canard emblématique du goût hexagonal pour les magouilles et les dénonciations anonymes ! Dans un tel contexte nauséabond, WikiLeaks, dont la mission citoyenne était la publication de documents confidentiels en libre accès, passe pour un fauteur de troubles, malgré ses sources et ses motivations clairement affichées. Ce monde est injuste !

Deux poids, deux mesures à la faveur des circonstances

Injuste ? Par le passé, le pouvoir socialiste a eu des connivences avec le Canard enchaîné. A-t-il fait des confidences sur la fille cachée du Président? C'est ce qu'on appelle pudiquement auto-censure... Sa proximité avec François Mitterrand l'a également empêché de traiter à fond les affaires Bousquet, du Rainbow Warrior ou des écoutes de l'Elysée. Il s'est encore compromis lorsqu'il a pris la défense de Roland Dumas dans l'affaire Elf parce que Dumas était... son avocat.

Mais la polémique qui accabla Michèle Alliot-Marie, était-elle juste ? Pour des vacances tunisiennes entre amis, la presse a tiré parti de la révolte populaire qui a suivi pour descendre la ministre des Affaires étrangères, en enchevêtrant des liens entre sa fonction et sa vie privée.

L'intérêt de la presse conventionnelle

Quelques organes de presse se spécialisent en effet dans la recherche des faits, mais qui les interpelle sur leurs informateurs et leurs motivations ? Les Suisses s'en étonnent et pourtant ils n'ont pas connu cette période douloureuse que nous avons traversée où, pour de troubles raisons des innocents pouvaient être dénoncés à l'occupant nazi. Le Canard alimente d'ailleurs toujours ses chalands d'histoires troubles et tordues et les repaît de révélations que l'anonymat des informateurs ne perturbe pas. Le Canard en fait ses choux gras, ses journalistes vivent très bien et les amateurs d'arrières boutiques en redemandent. Sur papier, hors Internet.

Ce fonds de commerce est d'ailleurs protégé par la loi, comme un claque par son souteneur.
La liberté de la presse est en effet renforcée par le droit au secret des sources.
Les collabos anonymes - des contributeurs, pour Le Post - appartiennent-ils à l'entourage de la victime ? Peuvent-ils justifier leur bassesse par un traumatisme moral assez sensible pour laisser filtrer des agissements répréhensibles, mais assez supportable pour n'être pas trop pressés de fragiliser leur carrière par une dénonciation publique ? Des dénonciateurs professionnels, payés ou pas pour tourmenter les people sur lesquels ils détiennent quelque information ? Des adversaires politiques ou syndicaux ? Dans quelle proportion sont-ils des fonctionnaires de l'administration centrale? Des militants infiltrés ou intouchables ?
Une rumeur peut en toute légalité attenter à la vie de Monsieur-Tout-le-Monde, mais plus sûrement à celle des acteurs de la vie publique. Qu'ils souffrent à petits feux, puisqu'ils ont du pouvoir, de l'argent ou la célébrité. La réussite est une tare en France. Elle autorise donc à assassiner froidement un présumé innocent et à torturer son entourage : la déontologie professionnelle est sauve !

Les fuites font partie de la vie politique, économique ou mondaine.
Elles fabriquent les "affaires" où le public trempe son indignation de collectivité mécontente. La France cultive le genre avec une constance jubilatoire, Le Canard enchaîné prospère depuis bientôt cent ans sur le tas d'ordures d’une population de ratés avides qui lui livrent ses petites turpitudes et ses grosses saletés sur un plateau d'argent, que ce soit en catimini, autour d'un verre ou par téléphone, semaine après semaine, nuit après nuit. Les scandales sont, avec les grèves, le moyen infâme de secouer les ministères entre deux élections. Pour le commun des mortels - celui dont ils n'ont rien à faire sinon lui prendre son fric et instrumentaliser sa capacité à s'indigner - pour lui, il n'est aucune nécessité honorable de dénoncer, mais pourquoi la presse corrompue se priverait-elle de moraliser ce bas monde en se faisant du pognon, si, de surcroit, elle peut nuire !

Tous pourris, sauf le Canard et Mediapart

Cette France qui savoure les fuites sans se poser de questions sur l’identité et les motifs de leurs auteurs n’a que dédain pour WikiLeaks et antipathie pour Julian Assange, son principal fondateur. Opposition et pouvoir sont sur la même ligne: WikiLeaks est pour la gauche française un WikiBrother, le clone du Big Brother de George Orwell.
Le Canard enchaîné joint sa voix à celle de grands ténors du Parti socialiste et de l’extrême gauche pour défendre le droit de l’Etat au secret, et par là son devoir de dévoiler, comme bon lui semble et comme faire se peut, les indélicatesses des bénéficiaires de l'ordre établi.

Sur le créneau de l'ignoble, ils ne tolèrent aucun concurrent
En identifiant ses sources (les carnets des soldats en Afghanistan ou les dépêches des ambassadeurs du Département d’Etat américain) et en exposant ouvertement ses motivations (la progression de la transparence gouvernementale), WikiLeaks commet deux crimes insupportables à la société politico-médiatique française. Jalouse de ses privilèges, à l'abri de sa forteresse de prérogatives, elle est cependant accessible par le raid ou la traîtrise, cible rêvée des vigilants de "l’intérêt public" qui ont des petits traitres-citoyens à l’intérieur.
L’idéologie de WikiLeaks détruit les intrigues de cour. Alors, la cour casse le jouet: elle banalise la fuite de ses dépêches qu'elle décrète "sans aucun intérêt", tout en déclarant dangereuse sa quête de transparence.
En revanche, la destruction par voie anonyme d’une ministre des Affaires étrangères est à la fois valorisante et réparatrice. En vidant leurs informations dans la boîte aux lettres du Canard enchaîné, ses ennemis inconnus s’attirent la sympathie et se hissent au rang de défenseurs de l’honneur de la République.
Si WikiLeaks réalise son idéal, il n’y a plus besoin de Canard enchaîné.
Donc, en effet, WikiLeaks est potentiellement dangereux.

WikiLeaks brouille le jeu des media
Face à Eric Besson, qui chercha avec les USA du démocrate Obama, comment protéger les informations diplomatiques et mettre un terme à l'hébergement du site WikiLeaks en France, notre presse dite d'investigation joue un rôle ambigü de soutien à un site à la fois qualifié de pire « agence de renseignement du peuple » et casseur de la poule aux oeufs d'or de l'anonymat des sources; selon nos media, tant que WikiLeaks ne viole pas la loi, le pouvoir n'a pas à intervenir. Le problème, pour la presse, c'est que Wikileaks est clair sur l'origine de ses informations, pour les autres, c'est que la loi couvre la divulgation de secrets diplomatiques ou autres.
Il reste qu'un informateur de Wikileaks croupit actuellement en prison et que, contrairement à ce qu'on a failli nous faire perdre de vue, ce qui est secret n'est pas nécessairement vrai.

Bilan, selon Rue 89 ?

Selon ce site Internet, le chevalier de l'information libre a voulu faire de Wikileaks le service secret du peuple, mais sa lutte contre de terrifiantes puissances de l'ombre est devenue "une idéologie en noir et blanc aux relents conspirationnistes, opposant de gentils Assange et à la méchante CIA."

Le site de Libération n'est pas mécontent que l'initiative citoyenne fantasmée par Julien Assange ait foiré.
Reste le Canard enchaîné ou Mediapart, dont Rue 89 ne juge pas de ses méthodes et de ses dégâts idéologiques et humains...

Et non plus du fonctionnement du Canard: malgré ses quelque quatre-vingts employés, il n'a ni comité d'entreprise ni représentants de salariés.

Sa réputation de grand journal d'investigation est pourtant surfaite: il n'a pas la rigueur et la profondeur qu'on lui attribue et dont il s'auto-félicite: Lien

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